Parce qu'on aime la métacognition :)
Petite précision de la part d'Élisabeth Feytit concernant cet épisode. Elle s'est rendu compte qu'elle avait fait un raccourci au sujet des juges qui rendraient des sentences plus sévères avant le déjeuner parce qu’iels auraient faim… Donc voici son une auto-critique a posteriori :
Hop, hop, hop ! Je m’arrête tout de suite, car là, je viens de faire une affirmation simpliste et trompeuse. En montant l’émission et en cherchant des ressources pour vous sur le site metadechoc.fr, je me rends compte que j'ai diffusé une information erronée.
Alors, que s’est-il passé ? Ce que j’ai dit durant l’émission correspondait à mon souvenir, une réponse spontanée lors de ma discussion avec Camille Lin. Mais en revérifiant, horreur ! Je découvre qu’il existe effectivement des études qui se sont penchées sur les décisions des juges en fonction de l’heure de la journée, avant et après le déjeuner. Ces recherches montrent une sévérité accrue avant le repas… Cependant, déduire que cela est uniquement dû à la faim ? Eh bien, c'est sûrement bien plus complexe.
Le problème est là : quand on vulgarise un sujet sans creuser suffisamment, on peut facilement dire des énormités que les experts du domaine peuvent démolir en quelques arguments. Alors, revenons sur cette fameuse corrélation, parce qu’elle n’est pas nécessairement causée par la faim. En vérité, on ne sait même pas si c’est un facteur déterminant. Cette hypothèse reste plausible, mais, en approfondissant, d’autres explications logiques et probables émergent.
D’abord, les dossiers sont généralement présentés selon un ordre précis, pas aléatoirement. Par exemple, les détenus d’une même prison sont souvent regroupés pour passer avant ou après une pause, ce qui influe sur l’ordre de comparution. Ensuite, il est courant que les détenus sans avocat soient placés en fin de liste, alors que ceux qui en ont passent en premier, et on sait qu’un avocat peut influencer favorablement la sévérité de la peine. Logiquement, on retrouve en fin de matinée plus de cas sans défense, avec des peines souvent plus lourdes.
Autre point : les avocats, lorsqu’ils défendent plusieurs dossiers, choisissent eux-mêmes un ordre. Ils commencent en général par les affaires les plus simples, espérant un jugement clément, et finissent par les cas plus complexes. Ainsi, les dossiers compliqués, susceptibles d’avoir des sentences plus sévères, sont traités en fin de session.
Enfin, les chercheurs israéliens qui ont réalisé l’étude initiale n’ont pas précisé que les juges décident rarement seuls. Ils président une commission, souvent avec des criminologues ou travailleurs sociaux, ce qui rend la décision collégiale et moins sujette aux simples influences biologiques. Ce détail omis fausse l’interprétation de l’étude, laissant penser que la faim des juges est la cause principale de la sévérité de leurs décisions.
Pour conclure, il existe des études critiques de cette première publication, affirmant que le phénomène de « décisions favorables » en début de session pourrait être un artefact de l’ordre de présentation des dossiers, et que l’appétit des juges ne joue pas un rôle décisif dans les décisions de la commission.
Alors voilà ! Mea culpa ! C’est enrichissant, finalement, de déconstruire pourquoi on pense ce qu’on pense. Vive la métacognition !
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